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L’agriculture creusoise sur le front !

© SB

Il y a eu un avant, il y aura un après, mais pour le moment l’important est de sauver les meubles. Coronavirus : la pandémie est inscrite sur toutes les lèvres, ancrée au cœur de toutes les inquiétudes. Depuis plus d’un mois le mot d’ordre est « confinement ». Télétravail, chômage technique : la France du XXIe siècle semble connaître une crise sans précédent. Alors que la France est entrée dans un temps de pause jusqu’ici jamais vécu, des agriculteurs et des agricultrices continuent de faire tourner le pays à bout de bras.

« Aujourd’hui on constate la perte »
Pour Sébastien Brousse, producteur de lait installé en Gaec à Mérinchal avec Quentin Brousse, « l’impact de la crise est surtout ciblé sur des problèmes de transports et à l’écoulement des produits non sur la production ». Sur le Puy-de-Dôme, la fermeture des marchés et les difficultés de certains industriels à s’approvisionner en consommables sont significatives et impactent directement la filière lait. Les producteurs n’arrivent plus à écouler leurs fromages ni en ventes directes ni par le biais des entreprises. Pour pallier cette baisse, une demande a été faite afin de permettre aux industries laitières de stocker le lait (liquide ou fromage). Sodial, première coopérative laitière française, n’est pas en mesure de faire face en termes de collecte. « Sodial nous a expliqué qu’elle ne pourra pas prendre en charge la totalité du lait produit puisque qu’elle échange déjà du lait par solidarité avec d’autres entreprises » explique Sébastien Brousse. Chez Coopal, la tonne de lait est payé 25 € de moins. Sur le plan national, un accord a été trouvé concernant la réduction des volumes pour tenter de limiter les problèmes d’engorgement du marché. Celui-ci prévoit un paiement à hauteur de 320 € les 1 000 litres à condition de présenter une baisse de production allant de 2 % à 5 % de moins par rapport à celle d’avril 2019. Sur leur Gaec, Sébastien et Quentin comptent environs 40 000 L sur le mois d’avril de lait produits et rachetés par Coopal. « La différence entre le prix normal du lait et celui avec la crise résulte à obtenir un manque à gagner de 1 000 € ».
Une conséquence qui pourrait être très préjudiciable si la crise devait persister. Les deux producteurs ont cependant instauré des mesures sanitaires lors de la collecte de leur lait « nous avons mis en place des gants et des lingettes alcoolisées pour les transporteurs ». Des mesures qu’ils jugent nécessaires pour enrayer la propagation du virus car le doute plane sur chaque maillon « si le virus s’installe au niveau du transport ou des usines comment fait-on ? ». Des inquiétudes qui malgré l’inédit de la situation n’entachent pas l’optimisme de l’après. Pour la suite ? Sébastien Brousse la voit un peu plus solidaire. « Sur la Creuse, la page facebook Ça se passe en Creuse avec le soutien de la Chambre d’Agriculture de la Creuse, a mis en place un site « produits locaux creuse » avec une carte du département regroupant les différents producteurs en vente directes. Cette crise c’est peut-être une chance de voir se développer différents partenariats, parfois inattendus. Il faudra continuer de creuser dans ce sens ! ». Une note toute aussi positive est celle sur l’agribashing si ardemment présent depuis plusieurs mois. Une vision intra-crise qui semble redorer le blason de l’agriculture et de ceux et celles qui la façonne au quotidien. De quoi mettre du beurre dans les épinards et peut-être enterrer la hache de guerre au-delà de la crise. Agriculture valable pour 60 jours, agriculture nécessaire toujours.

« Je ne sais pas comment on va se relever »
Du côté de Sannat, c’est le même constat : la crise et le confinement altèrent dramatiquement l’agriculture. Sylvain Paris, éleveur bovin et ovin installé en EARL depuis 2012 semble dubitatif concernant l’après covid. Même s’il rapporte qu’il n’y a pas vraiment eu de changement concernant la vente des routards il est néanmoins perplexe sur la baisse significative des prix sur les bêtes de réformes. « Il faut compter entre 30 centimes à 40 centimes de moins du kilo en charolaise ». Sur le mois d’avril, l’éleveur explique qu’il devait avoir trois bêtes à partir à l’abattoir « comptez 450 kilos de carcasse à 40 centimes de moins par kilo, vous allez vite comprendre le manque à gagner ». Un impact sur le prix de la viande lié au fonctionnement ralenti des abattoirs. « On nous explique qu’avec la fermeture des structures comme les cantines il y a une baisse de régime, ça se répercute sur les prix et profite aux abattoirs » explicite Sylvain Paris.

De gros soucis au niveau ovin
Pâques 2020 n’aura pas été fêté comme Pâques 2019. « L’an passé je vendais mes agneaux entre 7 € et 7 € 20 le kilo de carcasse pour les abattoirs. Cette année le prix tourne entre 5 € 30 et 5 € 50. Sur un agneau de 18 à 20 kilos la perte est importante ». Actuellement le marché ovin est engorgé et les agneaux peinent à partir. Sylvain accuse le coup : « cette année j’avais 40 agneaux prêts à partir, le résultat est sans appel : aucun n’a pu partir ». La difficulté se trouve désormais dans le déclassement qui va se faire par kilo/carcasse. « Si l’agneau dépasse 23 kilos, il perd en prix ; à la suite de la crise si les cours ne remontent pas durant l’année, l’issue me semble inévitable, je devrais stopper mon activité ovine ! ». Un constat dramatique qui s’ajoute aux premières spéculations sur la sécheresse 2020. « Tout s’additionne, on voit déjà les prémices d’une autre sécheresse ». Une conjoncture qui laisse dubitatif sur les éventuelles possibilités de pouvoir se relever… une chance encore que nos éleveurs creusois ne perdent pas totalement espoir « même si je dois arrêter le secteur ovin, je suis et je resterai agriculteur ».

Produits locaux Creuse : le coup de l’initiateur anonyme

 

Comme dans toute bonne histoire il y a un méchant et un gentil. Le méchant on le connait tous c’est le covid-19, le gentil lui, a décidé de rester anonyme. « Nous sommes en temps de guerre » et quoi de mieux en des temps incertains que d’apporter de l’aide à ceux qui sont en demande. C’est l’idée qui a semble-t-il trotté dans la tête de ce bon samaritain voulant prêter main forte aux producteurs locaux tout en impulsant un élan de solidarité auprès de la population creusoise. « L’idée est venue en même temps que je voyais différentes structures fermer autour de moi ». Ayant des connaissances en cartographies, il prend alors contact avec Sylvain Gengo de Ça se passe en Creuse et propose de mettre en place une carte permettant de répertorier les producteurs locaux, les drives et les marchés autorisés sur le département. L’utilisation du numérique offre une visibilité quasi instantanée « Ce projet ouvert l’est aussi dans ces outils utilisés. Dans une situation où la protection des données est aussi d’actualité, nous avons à cœur d’utiliser le plus possible des outils numériques non intrusifs. Donc ici des outils libres comme FramaForms et OpenStreetMap ». L’initiative se veut citoyenne et ouverte et ne demande à celui qui souhaite apparaître sur la carte que le simple remplissage du formulaire en ligne. Avec plus de 1 000 visites par jour, cette carte vient renforcer la liste déjà connue et proposée par la Chambre d’Agriculture avec Bienvenue à la ferme. La Chambre d’agriculture a par ailleurs souhaité faire partie du projet. « Le principe est de donner un maximum d’informations aux consommateurs mais aussi aux producteurs ». Un outil complémentaire qui n’a ni pour but de prendre la place du projet institutionnel et initial de la CDA mais bel et bien de contribuer à quadriller le paysage départemental des productions locales. « On ne veut pas révolutionner la chose, ni faire de miracle, mais s’ouvrir sur quelque chose d’un peu plus innovant et dynamique grâce à l’information numérique ». Un projet que son initiateur espère social, au plus près de tous les citoyens et solidaire, offrant encore plus de visibilité sur les produits locaux et la proximité avec les citoyens. Un espoir sans doute d’en faire un modèle d’une économie sociale et solidaire demain, avec une vraie éthique et orienté vers l’économie circulaire territoriale. Jean-Baptiste Moreau, contacté pour l’occasion, voit cette entreprise d’un très bon œil « le projet fait suite à la liste de Bienvenue à la ferme. Elle a été retravaillée et offre une meilleure visibilité. Globalement les retours sont très positifs avec cette carte mais aussi grâce aux drives et aux marchés autorisés par les maires de différentes communes. Elle a un rôle de facilitateur ! ». Pour la suite ? Notre initiateur anonyme ne manque pas d’idées et semble vouloir croire à la pérennité de ce projet en le voyant « pourquoi pas, après la crise, encore évoluer »…

https://produits-locaux-creuse.fr

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